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À la découverte d’un poète du XV° siècle, breton et méconnu

CONFÉRENCE

Par Olivier Vallentin

À la découverte d'un écrivain du XVe siècle, breton et méconnu.

Conférence du 9 avril 2025

Maison des Associations, Vannes

Un manuscrit connu, un auteur inconnu

Le catalogue de la vente de manuscrits organisée par Sotheby’s le 18 juin 1991 à Londres donne pour le lot 116 :

« C’est un manuscrit extrêmement rare de littérature médiévale française jamais publié, d’environ 12 500 vers. Le seul autre manuscrit connu est à la BnF. Les deux manuscrits indiquent que l’auteur a fini son travail entre vêpres et complies le 8 novembre 1451.  Le nom de l’auteur est donné par le vers : « bien fuz nomme châteautournant, ung francoys et ung bretonnant ». Le texte parle d’une tour tournante mais le nom ou le pseudonyme ne sont pas clairs. Le prénom, Alain, est donné par un autre vers ».

Si l’auteur est inconnu, le manuscrit est connu, les propriétaires en sont connus depuis Claude de Rieux (1497-1532), nous trouvons au premier folio :

« Ce present libvre est et appartient a hault et puissant seigneur monseigneur Claude de Rieux et de Rochefort, baron d’Ancenys comte de Harcourt, vicomte de Donges seigneur de Largouet et de Chasteauneuff ».

Ce manuscrit a été vendu à Londres au moment de la Révolution Française et est resté entre les mains de collectionneurs anglais au XIX° et au XX° siècle. Le 18 juin 1991, il est acheté par l’université d’Otemae, université japonaise et part au Japon.

À la recherche d’Alain Chasteautournant

En 2017, Yorio OTAKA (1931-2019), professeur des universités d’Osaka et d’Otemae, contacte Jean Luc DEUFFIC pour lui demander de rechercher qui est d’Alain Chasteautournant.  Jean Luc DEUFFIC comprend le sens de la phrase « châteautournant, ung francoys et ung bretonnant » et apporte la solution, la traduction en breton de tournant est tro et Chateautro est un lieu-dit de Guilliers et une famille connue.

Autour de 1450, il existe un Alain Chasteautro, procureur de Beatrix de Clisson et du comté de le Porhoët qui possède les caractéristiques pour être notre auteur, Cet Alain Chasteautro apparait dans plusieurs actes et notamment dans les procès entre le duc de Bretagne et Beatrix de Clisson pour régler la succession de son père : Olivier de Clisson.

L’œuvre

L’œuvre est un poème d’environ 13 000 vers écrit en octosyllabes. Le poème est construit autour des dialogues entre l’auteur et la « dame », représentation de différents personnages allégoriques.

L’œuvre nous apprend que l’auteur espère trouver dans l’écriture une consolation après la mort de sa femme mais aussi qu’il se considère comme un homme laid, sans grand savoir (fausse modestie de l’écrivain ?)

Les allégories représentent :

  • La Douleur (souvenir de l’épouse disparue)
  • La Folle Plaisance (on court à sa perte en la suivant)
  • Le Souvenir (qui réveille la Douleur et qui vante les vertus de l’épouse disparue)
  • La Connaissance (engendré par la Raison et l’Entendement et qui chasse la Douleur)
  • …..

L’œuvre montre un homme de culture, il traduit de nombreux passages de l’Ancien et du Nouveau Testament, il cite Mahomet. Le poème utilise plusieurs éléments qui peuvent être rapprochés du cycle arthurien.

Conclusion

Alain de Chasteautro est-il le premier poète connu originaire du Morbihan et écrivant une œuvre en français ?

Alain de Chasteautro dialogue avec La Connaissance (engendré par la Raison et l’Entendement), c’est le même besoin de connaissance qui le fait sortir du néant après cinq siècles d’oubli.

Ayons l’espoir qu’un jour Alain de Chasteautro trouvera des chercheurs pour établir le texte et un éditeur.

Auteur

Olivier Vallentin, président de la Société polymathique du Morbihan